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Le prix Duchamp 2016
Kader Attia

19 octobre 2016 Affaires
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 Créé en 2000 à l’initiative de l’Association pour la diffusion internationale de l’art français (Adiaf), le prix Marcel Duchamp 2016 a été remis mardi 18 octobre à l’artiste franco-algérien Kader Attia, né en 1970. Dans un contexte où prospèrent les discours inquiets autour de l’identité française, la nouvelle édition de ce prix avait nommé trois autres créateurs aux origines multiples : Barthélémy Toguo, né au Cameroun, l’Allemande Ulla von Brandenburg ou Yto Barrada, qui se partage entre le Maroc, la France et les Etats-Unis. Tous les quatre sont exposés jusqu’au 30 janvier 2017 au Centre Pompidou.

« Ce parti pris souligne la notion de France, terre d’accueil, mais aussi le goût d’universalisme qui est le fondement de la culture française, confie le collectionneur Gilles Fuchs, fondateur de l’Adiaf. Il est vrai que dans le contexte actuel, cette attitude qui a toujours été la nôtre prend une résonance particulière, mais on ne peut qu’être heureux que la France continue à attirer – et à accueillir – tant d’artistes du monde entier qui nous enrichissent profondément. » Cette cuvée donne aussi une prime au politique – mieux, à une certaine éthique – quand l’art actuel tend parfois à se vitrifier dans des formes décoratives ou absconses.

Kader Attia à Berlin, le 3 juillet 2016.

Un thème, la réparation

Toute discussion avec Kader Attia glisse vite vers l’anthropologie et l’ethnologie, la psychanalyse, la philosophie et l’architecture. Traquant les refoulés de l’Histoire, l’artiste a cristallisé depuis quinze ans ses recherches autour d’un thème, la réparation. Réparation à prendre au sens propre, avec les « gueules cassées » de la première guerre mondiale et les sculptures africaines suturées ou agrafées, mais aussi au sens figuré de dédommagement. Peut-on panser une blessure mémorielle ou physique ? Une prothèse pallie-t-elle la perte et l’incomplétude ? Doit-on vivre avec le souvenir d’un membre fantôme, ou accepter son irrévocable disparition ?

Ces questions, cet artiste érudit entend aussi les explorer dans la Colonie, un lieu qu’il ouvrira le 21 octobre dans le 10e arrondissement de Paris. A la fois bar, centre de débat et d’exposition, cet espace porté par le bénévolat de cinq amis veut dépasser les remugles de la colonisation. « J’aimerais que la société française s’accepte comme elle est, qu’elle mesure l’importance des cultures qui ont forgé son économie, mais aussi sa psyché depuis deux siècles. La Colonie, ce n’est pas un projet vindicatif, mais la volonté de jeter des ponts, précise l’artiste. On veut en finir avec les clichés et caricatures, les images en noir et blanc des non-alignés ou de la bataille d’Alger, inventer un discours nouveau, voir ce qu’on peut reconstruire à partir de l’héritage de la décolonisation. »

Et d’ajouter: « Il ne s’agit pas juste de tirer un trait sur la colonisation, mais aussi souligner la nécessité d’une autocritique de la part des anciens colonisés. Les jeunes ont un discours idéalisant autour de la révolution. Les vieux militants de la décolonisation, eux, disent : “Arrêtez ces discours ! L’indépendance, vous l’avez eue ; construisez un monde nouveau, retroussez vos manches”. »

Kader Attia, artiste : « J’adore Paris comme un dingue, mais c’est une ville d’extrêmes »

L’idée d’un lieu parisien de pensée germait depuis cinq ans dans l’esprit de Kader Attia. Les attentats de Charlie Hebdo et du 13 novembre 2015 en ont accéléré l’urgence. « J’adore Paris comme un dingue, mais c’est une ville d’extrêmes, où l’on voit devant le même Abribus la touriste japonaise avec son sac griffé et un SDF, poursuit l’artiste. D’énormes crevasses se sont créées, et il est urgent de les remplir par du débat, de la pensée, du contenu. Il faut se mettre au travail parce qu’autrement l’horizon c’est le fascisme, l’islamisme, la pensée manichéenne. »

Dans cette maison située à un jet de pierre de la gare du Nord, les visiteurs pourront siroter un café ou une bière au bar, mais aussi écouter une à deux fois par mois activistes et créateurs, penseurs de renom ou de l’ombre, débattre de grands sujets de société pour « comprendre le monde dans lequel on baigne et d’où l’on vient ». Un dernier niveau sera ouvert en 2017 pour des expositions, elles aussi militantes.

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