Je suis passionné par cette nouvelle histoire que sont en train d'écrire des étudiants entre ces deux pays si proches et si éloignés à la fois »

 

  Né en Algérie d’une mère architecte et d’un père enseignant, Réda Seddiki a intégré une section mathématique à Tlemcen. A 17 ans, il obtient son Bac en Algérie mention Bien. Il arrive ensuite à Paris à la Faculté de sciences de la Sorbonne. Dès lors, il se passionne pour le théâtre et dans le cadre de ses activités périscolaires, il convie à l’amphithéâtre de son université quelques talents émergents, humoristes depuis reconnus. Parallèlement, il écrit un premier seul en scène. Celui-ci, programmé bien vite dans une salle parisienne, rencontre l’adhésion des spectateurs. Au fur et à mesure, le spectacle « LETTRE A FRANCE » attire de plus en plus de public dont l’intérêt dépasse celui de simple curiosité. Le 30 novembre 2014, il reçoit le TOPIN d’OR au Festival Top In Humour de Chartres. D’autres scènes s’intéressent à « LETTRE A FRANCE » : fréquents passages au Point-Virgule à Paris et en tournée avec le Point-Virgule, programmation au Théâtre de Bagneux, invité des festivals : In des Arts Burlesques de Saint-Etienne, Festival Humour et Eau Salée, Festival de Soyaux (Fou ! d’humour), Festival Algé’Rire...


 

 

Vous avez un sketch qui explique votre projet d’études et votre passage à Campus France Algérie, pourquoi avoir choisi de partager cette expérience ?

Pour mon parcours, j'ai commencé en 2008 par une bi-licence mathématique et informatique à l'Université de Pierre et Marie Curie à Paris. J'ai choisi ce parcours car j'aime ces deux domaines. De plus il y avait à la clé un échange avec l'Université de Brown. J'ai eu donc l'o

 

pportunité d'aller aux Etats Unis en 2010, deux mois au sein du département de Mathématiques Appliquées de Brown. Après ces 3 ans, j'ai choisi dans la même faculté un Master Algorithmique et Programmation où je me suis spécialisé dans le domaine de la cryptographie et j'ai été diplômé en 2013. J'ai en effet un sketch sur le passage par Campus France . J'ai choisi de partager cette expérience car je trouvais qu'il y avait une nouvelle génération d'Algériens en France qui est venue faire des études mais qui n'était pas représentée sur la scène de l'humour francophone. D'où ma volonté d'écrire sur ce sujet.

 

 

Avez-vous  anecdote sur votre vie étudiante en France ?

Une petite anecdote sur ma vie étudiante ? Très bonne question, il y' en a tellement ! Premier cours en Amphi, de mathématiques. Un cours d'analyse, 200 étudiants. Une prof fait une démonstration, puis demande : "Levez la main les gens qui ont vu ça au lycée". Naturellement je lève la main et je me rends compte que j'étais le seul. Grand moment de solitude au milieu de l'amphithéâtre, surtout qu'elle rajoute "Le programme de mathématiques en Algérie surpasse celui en France" (Elle savait d'où je venais). Bon tout le monde savait que j'étais Algérien, mais j'ai appris que niveau mathématiques j'allais me balader.

 

 Que vous a apporté cette expérience d’études en France ?

Cette expérience en France m'a apporté énormément de choses... Je suis arrivé à Paris à 17 ans, donc j'ai tout appris, j'ai rencontré des gens qui venaient du monde entier, je me suis engagé dans milieu associatif à la fac, j'ai traversé l'Atlantique pour les Etats-Unis, j'ai découvert les galères parisiennes, la dureté de la vie, les pâtes, surtout les pâtes... beaucoup les pâtes, les joies du job étudiant à 5h du matin. Pour moi c'est le plus important, au-delà du diplôme. D'ailleurs j'en ai fait un spectacle, dans ce dernier je dis : " Si l'Algérie m'a donné la vie, la France me l'a apprise".

 

Comment devient-on humoriste ?

Comment on devient humoriste ? C'est très simple, un jour je vais voir un spectacle d'humour, 20 euros, pour un étudiant, ça fait mal. Du coup avec un ami on a créé une association à la fac, et on a essayé de ramener des humoristes pour jouer dans notre fac gratuitement et en contrepartie on leur fait profiter de notre réseau de 30 000 étudiants pour leur faire de la pub, ce qui a permis aux étudiants d'accéder à un spectacle pour lequel ils auraient payé 20 euros. A force de côtoyer des artistes, nous avons commencé à écrire nos propres sketchs, et de fil en aiguille on devient humoriste.

 

Qu’est-ce qui a changé suite à votre expérience de vie étudiante en France ?

 

 

 Qu'est ce qui a changé après mon expérience en France ? Maintenant j'utilise l'expression "de fil en aiguille" par exemple...tout a changé depuis. Je ne saurais vous dire exactement ce qui a changé, mais je ne suis plus la même personne. En fait, quand je suis arrivé en France en 2008, j'ai eu comme l'impression de renaître, je voyais le monde avec les yeux d'un enfant mais avec la lucidité d'un adulte. On peut parler de l'aspect des études, une grande université française, un diplôme reconnu dans le monde entier, mais ce n'est rien face à l’expérience humaine. Rencontrer des gens avec qui on n'a pas les mêmes convictions, la même éducation, la même vision des choses c'est incroyable car on ne fait qu'apprendre. Pour résumer, si avant je voyais la vie comme une réussite matérielle, j'avais la soif des diplômes, je rêvais d'être un homme d'affaires tirés à quatre épingles pour parcourir le monde, pour dénicher les bonnes affaires, avec le temps mes objectifs se sont affinés, et maintenant j'ai soif de découvertes humaines, de partage d’expériences uniques. D'où l'art du spectacle...

 

Quelles sont vos attentes concernant le nouveau réseau  France Alumni Algérie ?

Ce que j'attends du réseau ? Beaucoup de choses, rencontrer plus de personnes, s'il y a des algériens de passage à Paris et qui veulent faire du "couchsurfing" ça sera avec grand plaisir...

 

Avez- vous mot d’encouragement pour les futurs étudiants algériens en France ?

J'aimerais encourager tous les futurs étudiants algériens qui vont venir en France à déjà venir voir mon spectacle, c'est un passage obligé. Je vais proposer à Campus France Algérie de faire un partenariat, tout étudiant doit inclure avec le dossier une déclaration sur l'honneur " une fois en France, j'irai voir Réda Seddiki dans son spectacle Lettre à France". Plus sérieusement, en un mot je dirais "PROFITEZ". Il n'y a pas plus enrichissant que d'aller dans un autre pays et découvrir une autre culture, d'autres traditions et surtout ne voyez pas la différence comme un handicap, c'est une richesse. Vous savez quand je rentre en Algérie, ça me manque d'être différent, je deviens banal, comme tout le monde. Donc juste "PROFITEZ".

 

Vous allez prochainement jouer votre spectacle à l’Institut Français de Tlemcen (samedi 26 mars à 18h00, Hôtel Agadir), votre ville natale. Quel effet vous fait ce retour au pays ?

Oh le retour à Tlemcen, ma ville natale. Je vous avoue, j'ai peur. Je suis attendu, je suis parti faire des mathématiques, je reviens avec un spectacle. On ne voit pas ça comme un métier "Artiste", enfin si on verra que c'est un métier si un jour je gagne des milliers d'euros. J'appréhende aussi par rapport au contenu du spectacle, vous savez nous avons une certaine vision de la France, une vision que j'avais avant, et j'ai envie de casser ce mythe surtout au vue de l'actualité et le nombre de jeunes qui traversent la méditerranée sans certitudes. Le fil rouge du spectacle c'est "Les algériens n'ont rien à envier au monde entier". J'espère que le public va jouer le jeu.